Une séance bien dure ce matin : 12 fois 400 avec une minute de récup, encadrés par 2 fois 20 minutes en endurance. Ayant voyagé hier et couché à pas d’heure, j’ai une grosse flemme ce matin et je procrastine joyeusement, surtout que le temps a l’air assez maussade. Mais une séance, c’est une séance et je pars tranquillement vers le stade du Pré Saint Jean à Saint Cloud, appréciant d’avoir un stade à portée de main (ou de pieds) dont le temps pour y aller correspond à peu près à l’endurance nécessaire à l’échauffement. Quel luxe !
Pour autant, ça caille un peu, il y a un petit vent et je frissonne en sortant de la maison. Température perçue, 3 degrés, humidité 81%. Comme d’habitude au bout de quelques minutes le froid n’est pas un problème et je savoure ma sensation de liberté, tout en appréhendant un peu la séance à venir.
Arrivé au stade, complètement désert, un gardien me fait signe de m’arrêter. Ayant déjà eu maille à partir avec celui du Stade des Fontaines à Sèvres, qui m’avait expliqué que oui, c’était ouvert au public, mais que non, je ne pouvais pas m’y entrainer pour un problème d’assurance, je m’arrête poliment et décoche mon sourire le plus commercial, celui avec plein de dents.
« Monsieur, vous ne pouvez pas rentrer sur le stade dans cette tenue »
Damned, aurais-je oublié mon short en sortant de la maison ? Non, non, il est bien là. Je suis juste torse nu et un peu moite. C’est quoi le problème exactement ?
« Monsieur, vous pouvez courir torse nu dans la rue si vous voulez, mais sur le stade c’est interdit »
Diantre. Et pourquoi donc ? « A cause des enfants ». Ah. Je vérifie que mes organes génitaux sont bien rangés à leur place, tout est là où il faut et rien ne dépasse, malgré leurs dimensions hors norme même par climat polaire :-). Je fais part de mon incrédulité, rien n’y fait. « M’sieur, c’est pas moi, c’est le règlement ». Aaaaah, le RRRRRRèglement. Comme ne j’ai pas vraiment envie de faire péter la séance maintenant que je suis là, je transige, idée lumineuse – « Peut-être est-ce que vous pouvez me prêter un T shirt si mon indécence est si choquante ? ». OK, il est sympa, me file une taille XXXXXL, et je trottine tranquillement vers la piste, un peu éloignée des vestiaires en me disant que je m’en sors bien et que je vais virer le t-shirt dès que je serai sur la piste. En plus il y a un rayon de soleil, la piste luit avec les restes de pluie de la veille, tout est désert, c’est super.
Je fais 3 ou 4 tours de 400, enfermé dans ma bulle et voilà t’y pas que le gardien revient, cette fois avec deux acolytes. Merde. Je suis au milieu de mon tour, en train de compter les secondes, ils se plantent tous les trois sur la piste, je dis « OK, OK, c’est bon, laissez moi finir mon tour et je vais remettre votre putain de T shirt. ». Mais non, on m’arrête, j’ai le malheur de dire « Vous êtes chiants quand même », et là j’ai la totale, la leçon de morale, genre « Monsieur, on ne me parle pas sur ce ton. On peut pas vous faire confiance, barrez vous, et puis d’abord même si c’est ouvert au public, en fait c’est juste pour les écoles; etc. etc. » mais moi je veux finir ma séance, bordel, et à un contre 3, je n’ai aucune chance ! Un peu énervé, j’argumente que les enfants voient des films de cul sur internet à partir de 10 ans, avec double péné et orgasmes de 2 heures, et qu’un quinqua qui court sur une piste, c’est du pipi de chat à côté. Pas bon.
Finalement je fais appel à leur esprit sportif en mettant une petite dose lacrymale « J’ai failli mourir d’un cancer il y a deux ans, je fais le marathon de paris dans 3 semaines et je vais pas y arriver si je ne finis pas ma séance ! »
« Mais vous ne courez pas le marathon de paris torse-nu quand même ? » Inconcevable, je sens une incrédulité totale chez mes interlocuteurs. Mais si, je vous jure. Rétrospectivement je me dis que j’ai eu de la chance de ne pas me faire arrêter au Semi pour attentat à la pudeur. Bon, en faisant la carpette je finis par m’en sortir et ils me lâchent la grappe. Putain, j’ai eu chaud !
Rétrospectivement, je m’interroge.
Qu’est ce fait que notre société trouve indécent de faire des tours de piste sans t-shirt ? Le corps qui doit être caché, vieille réminiscence de la culture chrétienne ? Mais si je ne m’abuse le Christ est bien torse-nu, dans toutes les églises, et en plus dégoulinant de sang sur sa croix.
Qu’est-ce qui est le plus obscène et dérangeant socialement, le Delanghe qui court, ou les photos retouchées des idoles adolescentes, à grand coup de Photoshop, leur mettant dans la tête des idéaux physiques factices et les précipitant dans la chirurgie esthétique dès 16 ans ?
Ou les pubs qui dégoulinent de sexe sur les culs de bus, si bien nommés ?
Et alors que notre société dépense des fortunes en traitements de santé alors qu’une bonne dose d’exercice résout beaucoup de problèmes, restreindre l’accès à des équipements sportifs à des horaires impossibles ? C’est quoi la logique exactement ?
Ca ne m’aura pas empêché de faire une bonne séance de fractionné et cet arrêt intempestif m’aura permis de récupérer un peu plus que prévu entre deux tours. J’ai même un peu trop bastonné, n’arrivant pas à me repérer sur les 100 mètres. Oui 400 mètres, c’est 4 fois 100 mètres, et le meilleur moyen de les faire à vitesse constante, c’est de se chronométrer tous les 100 mètres. Les tours de piste ça rend le GPS un peu fou … et j’ai du coup fait quelques tours en 1:25; Yes !
Je mettrai un t-shirt la prochaine fois que je dois aller sur ce stade. Bon, on ne me demande pas de mettre une burka, c’est déjà ça.
La vie en société consiste à accepter des contraintes absurdes en échange d’une certaine dose de sécurité…
C’est fou comme on on est conditionné pour concilier. J’aurais fait pareil.
Ceci dit cela restait la solution la plus rationnelle par rapport à mon objectif. Je me serais foutu sur la gueule avec les mecs 1. je me serai fait mal et 2. j’aurai pas fait ma séance d’entrainement; Laisser ma colère et surtout mon sentiment d’injustice prendre le dessus aurait été peu efficace. Moi c’est plutôt l’absence de latitude dans la prise de décision qui me frappe, et le « c’est le règlement, m’sieu », que pour le coup nous avons tous tendance à faire : se réfugier derrière une autorité supérieure, et arrêter de réfléchir à ce moment là.
Benjamin Franklin disait :
« Un peuple prêt à sacrifier un peu de liberté pour un peu de sécurité ne mérite ni l’une ni l’autre, et finit par perdre les deux ». C’est totalement d’actualité, nos libertés sont de plus en plus réduites.
Très bon blog que je lis depuis quelques mois. Si vous avez l’occasion de passer par des régions vallonnées je vous conseille le trail !
Un commentaire sympa de quelqu’un que je ne connais pas : un bonheur encore rare (donc merci beaucoup) qui me conforte dans mon envie de continuer à partager mes « méditations aérobiques ». J’essayerai de rester pertinent et pas trop narcissique, mais j’ai pas mal de choses que j’ai envie de partager. OK pour le trail, dès que j’ai réussi à faire un temps correct sur marathon :-). j’ai couru dans la neige cette semaine, en montagne, et j’avais vraiment l’impression d’être un Néanderthal en pleine ère glaciaire, c’était surréaliste.
Bonne journée !
Avec plaisir’ Je cours depuis 2 ans, mange paleo depuis 6 mois et me suis mis au minimalisme il y a 5 semaines… donc je ne suis peut-être pas très objectif quant à l’intérêt du fond de votre blog! La forme et le ton par contre sont très plaisants. Bonne chance pour les marathons!
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