Jeff Beck est mort

Je regardais encore une vidéo de concert de sa tournée actuelle l’autre jour, quand même épaté qu’il tourne encore à 78 ans, avec une section rythmique totalement incroyable (je suis moins fan de la partie avec Johnny Depp mais quand même) et là, boum.

Tout le gotha du rock est en larmes et raconte sa petite histoire, et moi aussi.

J’ai découvert Beck à travers mon pote « érudit rock » Laurent dans les années 74-75 je crois qui m’a fait écouter Shape of things avec son larsen légendaire et les premiers albums solo.

Je me souviens de ma réaction en écoutant les premières notes de guitare sur I’m going down, sur l’album Jeff Beck Group, l’album à l’orange. Je bricolais déjà un peu à la guitare et écoutais les Stones, Deep Purple, Alice Cooper … mais là … le phrasé, le son, le placement rythmique, tout est juste comme une espèce de de truc en fusion, organique, imprévisible, et qui va droit aux tripes. Dans tout l’album il y a des trucs incroyables mais cette intro je m’en souviens comme si c’était hier. D’ailleurs je viens de la réécouter et ca me fait toujours le même effet.

Le choc suivant ça a été Wired. Que j’ai acheté à sa sortie. La pochette déjà (j’en parle dans mon post sur mes guitares ici). je mets le disque sur la platine de la nouvelle chaine stéréo de mes parents – Led Boots avec son rythme bancal posé sur un 4:4 et son larsen énorme en démarrage de chorus. Les larsens de Beck me sciaient tellement que j’ai acheté en 90 une des premières guitares avec un sustainer qui fait ce truc magique – la note qui tient et qui part en harmonique à l’octave, ca m’a toujours retourné. Et ca permet de faire ca sans avoir besoin d’un Marshall 100w triple corps – Jeff, comme ses compères de l’époque avait à la fin de sa carrière des sérieux problèmes de tinnitus, mais quand on voit les scènes avec 2 ou 3 triples corps à quelques mètres derrière les musiciens, à l’époque c’était pas pour décorer et je ne pense pas qu’ils jouaient avec des boules quies.

L’autre morceau qui m’a toujours troué le cul sur Wired (oui je peux dire ça c’est mon blog) c’est Goodbye Pork Pie Hat. Et notamment les solos au milieu, avec un effet peu courant, un ring modulator, qui donne cette espèce de distorsion géante, on dirait encore une fois de la lave en fusion, et ca monte à chaque tour, c’est juste monstrueux. J’ai osé essayer de le jouer, je l’ai appris note à note il y a quelques années juste pour essayer de comprendre mais bon. Il a un toucher tellement particulier que c’est très difficile à reproduire.

J’ai tous ses albums. Sur chaque, un ou deux morceaux qui vont droit au coeur. The Pump sur There and Back. En boucle au casque la nuit … J’ai adoré Emotion & Commotion produit par Trevor Horn (dont je recommande au passage l’excellente autobiographie qui vient de sortir), et Who Else … bon en fait y’a pas grand chose à jeter dans sa discographie.

Il y a le fabuleux DVD du concert Live à Ronnie Scott avec sa section rythmique Vinnie Colaiuta et Tal Wilkenfeld que j’ai usé jusqu’à la corde. Et la vidéo de Crossroads de Cause we’ve ended as lovers… avec cette entente musicale, des sourires, tout en jouant à un niveau totalement stratosphérique (jeu de mot facile). C’est marrant qu’il aie beaucoup joué avec des femmes dans sa section rythmique – dont la dernière mouture, avec Anika Nilles et Rhonda Smith qui sont des avions de chasse;

Je suis allé le voir à Paris en 79 quand il tournait avec Stanley Clarke. Je l’ai vu à l’Olympia et à Pleyel. J’en parle ici. Une grosse claque à chaque fois. Bêtement je suis pas allé le voir quand il est passé en 2022.

Bon voilà. C’est sans aucun doute le guitariste qui m’a le plus marqué musicalement et c’est un peu comme un vieil ami, il m’accompagne et fait partie de ma vie depuis que j’ai 15 ans.

Sans le connaitre personnellement j’admire son parcours – il a fait ce qu’il a voulu musicalement toute sa vie (il aurait pu rentrer dans les Stones remplacer Mick Taylor, vous imaginez ?), fait ses albums, bricolé ses hot-rods et basta. Il est pas devenu milliardaire mais il a creusé son sillon artistique, comme un artisan, un peu de génie et beaucoup, beaucoup, de boulot. Et à 78 ans, toujours au top de sa technique. Regardez cette vidéo qui date de Septembre 2022 …

Ca nous rappelle que notre passage sur terre est limité et peut se terminer brusquement. Dans des moments comme ca j’aimerais bien qu’il y ait un paradis. Au moins pour les guitaristes :-).

On se contentera de notre mémoire collective pour l’instant comme substitut d’immortalité. La musique est les vidéos sont toujours là, et

Réécoutez-le, c’est le meilleur hommage qu’on puisse lui faire. Moi je reprends un Kleenex en écoutant la vidéo que Rick Beato vient de sortir.

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3 commentaires pour Jeff Beck est mort

  1. Sylvain dit :

    Il a même eu le temps de figurer sur le dernier Ozzy Osbourne. On ne compte plus le nombre de ses collaborations…pour ma part, et comme c’est générationnel j’imagine, c’est plus un grand nom que j’ai écouté à droite et à gauche, plus qu’écouté son œuvre directement.

    J’ai même été soufflé qu’il soit à l’origine de Superstition de Stevie Wonder, entendu sur le podcast un dernier disque avant la fin du monde : https://undernierdisque.com/product/un-dernier-disque-avant-la-fin-du-monde

  2. paleophil dit :

    Oui y’a eu toute une histoire, Wonder a écrit la chanson pour Beck en échange de quelques parties de guitare, et Beck a laissé trainer l’affaire, Wonder l’a sortie en simple avant lui, ca a fait un carton, et ca a énervé Beck qui a eu un peu l’impression de s’être fait empapaouter, et quand il a sorti sa version tout le monde s’en foutait. Il s’est rattrapé en faisant de « cause we’ve ended as lovers » un de ses titres les plus célèbres, ce qui a du ramener un max de royalties à Wonder …

    • Sylvain dit :

      J’ai pas eu la notif !

      C’est bizarre je connais bien la période dorée de Stevie Wonder, et je ne vois pas où il l’a publiée cette chanson. Pas entre Talking Book et Songs in the key of life

      Y a eu pas mal de vidéos hommages ces temps-ci, que ça soit avec Rick Beato ou en français avec Florent Garcia. A chaque fois qu’un artiste meurt, ça me met face à mes lacunes musicales…

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