J’ai déjà écrit sur l’abondance et comment elle nous fait à la fois du mal et du bien. On va dire que j’essaye de tirer des généralités à partir de mon expérience personnelle.
Vendredi soir nous sommes invités chez des amis, il fait bon, l’ambiance est cool, l’alcool coule à flots, et je vide verre après verre … je me réveille le Samedi matin, pas vraiment en forme pour ma séance d’entrainement, et en me maudissant pour mon incapacité à résister au verre de rosé glacé servi avec un grand sourire.
Samedi soir, diner à nouveau, j’essaye d’être solide sur l’alcool, mais côté gâteau c’est « no limit », le consensus social est « gâteau maison, il faut que tu le testes … » et donc, je le teste bien que consciemment je n’en aie aucune envie.
Hier soir, diner avec un pote pour discuter de business, vin, whisky, chocolat à gogo … Coucher fort tard et un peu en vrac.
Ce matin, séance tranquille en endurance lente, après 35 minutes, le tendon droit explosé et là tel que j’écris je suis en train de glacer … et de boire du rosé glacé, justement. Tout en me maudissant de mes excès des jours précédents – même si ils n’ont rien à voir avec ce qui m’arrive.
Ou pas ?
Une lecture rapide de mon mode de vie pourra induire un diagnostic d’alcoolisme mondain et expliquer que la douleur au tendon est bien méritée eu égard à mes excès divers qui génèrent une acidité propice aux inflammations.
Et il y a sans doute un fond de vérité là dedans. Ou un vieux fond judéo-chrétien sur la nécessité de l’expiation des péchés de gourmandise ?
La question que je me pose moi c’est plutôt : pourquoi on (moi en l’occurrence) a tellement de mal à s’arrêter d’ingérer des substances plus ou moins toxiques et psychotropes ?
La réponse que je propose est que nous ne sommes pas faits pour l’abondance.
Tout notre organisme, nos désirs, notre système de récompense/punition niché au plus profond de notre système limbique nous dit : encore, encore, quand nous avons la possibilité de nous « goinfrer », que ce soit de nourriture, d’alcool, ou de … pouvoir. Ou de sexe ?
Parce que nous nous sommes construits biologiquement dans un environnement où il n’y avait rien, ou pas grand chose, en terme d’énergie disponible pour la survie. Donc tout était bon à prendre, la ruche gorgée de miel, les entrailles de l’antilope qu’on vient de tuer … la femelle pour se reproduire (je vais me faire des ennemis là je sens …)
Donc l’abondance nous rend fous (au pire) ou inopérants (au mieux).
On pourra me répondre que c’est un peu facile, et c’est vrai !
Je suis marathonien! un exemple socialement valorisé de volonté d’acier, capable de se lever à 5 heures du mat pour aller se faire des tours de piste dans la neige je l’ai fait !). Mais incapable de résister à toutes ces « tentations » à portée de frigo ou de supermarché.
Psychologie ou biologie ?
La cave est remplie de vin, le frigo de nourriture, on peut acheter des cigarettes partout … tout est disponible, et sans limite de quantité. Même si on a une éthique personnelle antagoniste avec tout ça, c’est dur de résister.
La question de la volonté et de la motivation est centrale à l’existence, à partir du moment où nous disposons d’un cortex qui nous permet d’avoir conscience de tout ça – et particulièrement importante pour les sportifs, amateurs comme professionnels.
Qu’est ce qui nous fait courir / nous lever le matin / nous faire mal dans un entraînement / trop picoler le soir ?
A partir du moment où le frigo est plein – ou la cave, l’abondance est à portée de main. Et les excès, faciles.
Toute la difficulté de l’exercice est comprendre que les excès sont le résultat d’un processus d’addiction, alors que nous avons tendance à le valoriser socialement : la cigarette après le repas, l’apéro entre amis, la bonne bouffe …. et faire en sorte que le cortex prenne le pas sur le cerveau limbique … pas évident.
Tout ça prend le pas sur notre capacité à raisonner ; faut il mettre un cadenas sur le frigo, ou faire un travail sur soi pour mettre à distance cette nécessité impérieuse de se remplir de sucre, d’alcool ou de nicotine ?
Je ne crois pas tellement au cadenas, je serais plutôt un promoteur de la prise de conscience, même si ce n’est pas toujours facile. Et c’est sans doute pour cela que j’écris un blog …
Je pense qu’il est nécessaire d’avoir un concept de libre arbitre et de mise en valeur de la volonté et de la responsabilité individuelle, même si je suis de plus en plus convaincu des processus biologiques sous-jacents.
Pour finir, mon propos n’est pas de discuter des conduites asociales ou sociopathes – mais plutôt des petites faiblesses de notre intimité. Notamment les miennes 🙂
Et la question que je te pose, ami lecteur, est : quelle est ta stratégie personnelle pour éviter que l’abondance à laquelle tu as accès ne te détruise ?
Ce post a été écrit avec une alcoolémie assez élevée, ce qui peut être une excuse pour son manque de cohérence. M’en fous, je suis chez moi et je n’ai pas besoin de prendre la voiture pour aller me coucher 🙂
D’après ce que tu écris l’abondance ne génère des excès qu’en tant qu’instrument de socialisation : dîner chez des amis, dîner à nouveau et encore dîner avec un pote.
Tu ne dis pas te précipiter sur ton frigo pour te goinfrer à toute heure du jour ou de la nuit, ni acheter de manière compulsive les nouveaux trucs à la mode dont tu n’as pas besoin. Donc l’abondance seule est un facteur nécessaire aux excès mais pas suffisant.
Pas besoin de mettre un cadenas sur ton frigo.
Essaie peut-être d’avoir moins d’amis ?
Ou de les rencontrer ailleurs qu’autour d’une table 😀
Ma femme dirait sans doute que je suis un acheteur compulsif, notamment de chaussures de course à pied et de guitares 🙂 . Sur ce plan j’ai personnellement l’impression de maitriser mes impulsions. C’est vrai que je ne me lève pas pas la nuit pour vider mon frigo ou boire des canons. Mon point dans l’article, c’est de remarquer que certains aliments ou produits (cigarette quand j’étais fumeur, bonbons et boissons sucrées, vin, saucisson, noisettes, …) en quelque sorte « débranchent » la volonté : je suis conscient du premier, et ensuite je suis en pilote automatique : « allez, encore un », jusqu’à ce qu’il n’y en aie plus d’accessible sans effort. C’est ça qui me fait penser à un acte réflexe et compulsif. En remarquant qu’aucun de ces produits n’existait il y a 10.000 ans.
Compulsif oui, réflexe certainement mais je ne pense pas que ce soit intrinsèque au produit parce que tu pourrais allonger la liste indéfiniment. Chips, cahouètes. Même des bâtonnets de carotte à tremper dans du fromage blanc (0% bien sûr) se laissent manger sans fin (testé pour vous).
Il me semble que c’est la fonction sociale de l’apéro ou du repas qui branche notre cerveau en mode grignotage automatique (ou picole). Et pour reprendre ton argument, l’apéro non plus n’existait pas il y a 10 000 ans, et les relations sociales à l’époque tournaient plutôt autour de la survie du groupe que de la convivialité.
Exact sur la fonction sociale, même si il n’arrive souvent de me lever toutes les 5 minutes pour attraper un truc à manger quand je travaille chez moi (faut dire que je suis installé dans la cuisine quand je télétravaille).
Je ne suis pas sur qu’il n’y aie pas eu de convivialité il y a 10.000 ans. La dimension sociale de l’humain (et typiquement, l’empathie, la convivialité et … les ragots) est assez liée à l’évolution de notre mode de vie et notamment la chasse en groupe, qui remonte à quelques centaines de milliers d’années.
Et comme à part chercher à manger il n’y avait pas de « travail » au sens où nous l’entendons aujourd’hui, je pense que nos ancêtres devaient passer pas mal de temps autour du feu le soir, à taper la discute et à échanger des bons plans.
Mais je suis dans le pur fantasme là évidemment.
Je ne pense pas qu’il y aie lieu à culpabiliser…Même si je trouve que tu as « un vieux fond judéo-chrétien » (ce qui au vu de ton blog me fait sourire) auquel nous ajouterons la sensibilité au mode de vie Paléo, qui nous promet aussi un « enfer diététique ».
Comment je gère? Pour ma part: « …j’y pense puis j’oublie, c’est la c’est la vie… »
Je culpabilise, puis je passe à autre chose. en me disant que la prochaine fois je ferai plus attention. Et bien sur ce n’est pas le cas.
Je souris en lisant les conseils sur les « aliments plaisirs » et autres, et leur action sur le cerveau…
Mais si nous avons du temps pour penser à cela, c’est que la vie nous est douce…
Merci pour le commentaire. Bien sur le fond judéo-chrétien est là, mais si ça ressemble à de la culpabilité ce n’en est pas, c’est plutôt de l’irritation par rapport à ces désirs que je n’arrive pas à contrôler (bon OK l’illusion de contrôle c’est peut être encore pire que la culpabilité :-). Ma démarche n’est pas de chercher l’enfer, mais plutôt d’avoir une « pleine conscience » (au sens de la méditation) de ce que j’ingère dans mon organisme en essayant d’être aligné entre mes goûts et ce qui est bon pour moi (au sens de : qui me permet de me sentir en forme le plus longtemps possible). et de constater que je suis souvent en pilote automatique.
Bien entendu mon commentaire sur ton fond « judéo-chrétien » est aussi une allusion à certains des écrits de ton blog…
Mais, plus tu fais attention à ce que tu manges, plus les écarts (puisqu’il nous faut les appeler ainsi) sont remarquables.
Une alimentation contrôlée, relativement simple donne de bons résultats: elle optimise la performance. (je suis réducteur pour aller à l’essentiel)
Mais si le « Médoc » coule à flot « ponctuellement » nous y ajoutons un élément extérieur. Et notre organisme n’aime pas trop la nouveauté: il doit aussi s’adapter, avec son cortège de déshydratation, d’alimentation acide, de difficultés à l’entraînement.
Pardonne-moi de généraliser, mais nous ne pouvons pas en permanence être en adéquation entre ce qui est bon pour notre organisme et ce que nous mangeons…Où alors à quel prix…Et pourtant, j’apporte mes repas sur mon lieu de travail.
Mais qu’y-a-t’il de mieux que de partager un bon verre de vin (du Bordeaux bien sur!!) avec…. une fois la journée terminée?
Et ce, même si tu ne le devrais pas…
l’équilibre est une succession de déséquilibres … je crois que c’est toi qui m’a recommandé Cyrille Gindre, et il en parle très bien. Et donc, des déséquilibres alimentaires, tant qu’ils sont ponctuels, sont acceptables tant qu’ils ne deviennent pas une règle. C’est vrai que plus on est attentif, et plus les écarts donne l’impression d’être massifs ! maintenant quand je mange 2 tranches de pain sur un repas j’ai l’impression de faire des excès incroyables alors qu’il y a 10 ans c’était mon entrée en matière systématique !
Stratégie serait un gros mot, mais j’ai remarqué que certaines techniques se sont transformées avec le temps en … habitudes!
Par exemple, il y a encore qqes années encore j’achetais des biscuits ou chocolats (Nutella pour être précis 🙂 ) au supermarché. J’ai arrêté d’un seul coup de les acheter, ce qui fait que je n’avais plus la tentation chez moi. Désormais je ne regarde même plus les rayons concernés au supermarché.
Pour ce qui est de l’alcool, pareil, j’ai commencé à boire plus lentement, et à boire de l’eau régulièrement avec. J’ai aussi fait un X sur les cocktails, qui contiennent en plus de l’alcool bcp de sucre. Maintenant je ne suis plus habitué du tout à boire en quantité, et je commence à me sentir mal si je bois 3-4 verres!
Bonjour Antoine,
Merci pour ton commentaire.
C’est une excellente remarque et qui rejoint ma propre expérience. C’est beaucoup plus difficile d’aller chercher un tabac ouvert le dimanche soir à 22 heures que de prendre une cigarette dans le paquet qu’on a dans la poche. Ca vaut pour le nutella, les sucreries, la bouteille de rosé au frais. Tous les bouquins de régime commencent d’ailleurs par « videz vos placards de tout ce que vous ne voulez pas manger et préparez à l’avance vos « snacks » en cas de fringale ».
Pour l’alcool, j’essaye de me forcer (en soirée) à boire un verre d’eau pour chaque verre de vin, histoire de sortir de la dimension réflexe de descendre des verres l’un après l’autre. Pas toujours facile – alors que je ne pense pas qu’il y aie de phénomène addictif, à mon niveau, avec l’alcool comme il peut y a voir avec les sucreries ou les cigarettes.
L’autre stratégie, effectivement, c’est de couper son vin avec de l’eau. Etant à Budapest le WE dernier, j’ai pu voir que c’était une pratique répandue, et que dans les bars ils proposent de « 1/3-2/3 » ou des « 2/3-1/3 » d’eau de Seltz avec du blanc ou du rosé. J’ai essayé, c’est vrai qu’on sent le gout du vin, dilué. Ca me parait être une stratégie intéressante, à tester à la maison !
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