Sortie ce matin … je ronchonne parce que le plan concocté par Jean propose une « LMVL » d’une heure au lieu de l’habituelle séance de VMA courte. Revenant d’une blessure, j’ai envie de bouffer de la piste, mais bon, j’ai appris la patience et après tout, pourquoi ne pas faire mon parcours habituel d’endurance différemment ?
Ma sortie dans le parc de Saint Cloud est hyper rodée, je pourrais la faire sur les mains, en pleine nuit et en marche arrière. Même si récemment j’ai innové un peu, en prenant les chemins de VTT et en m’aventurant plus dans la forêt.
Le LMVL c’est « lent moyen vite lent », un truc de Jean, une manière de travailler différentes allures au cours d’une seule sortie. Normalement utilisée pour les sorties longues, avec des séquences de 20 voire 30 minutes … Là c’est 4 fois 15 minutes.
Ayant couru en 5 fingers hier je prends les Mizuno histoire de ne pas trop tirer sur mes tendons d’Achille. Il fait frais, et beau. Je pars donc plus vite que d’habitude et le premier 1/4 d’heure se passe entre la concentration sur la respiration (1 2 … 1 2 3 …), la posture, les bras (on n’insistera jamais assez sur les bras, c’est tellement pas naturel comme mouvement quand on le fait …), et l’attention aux bobos – un tendon d’Achille gauche droit qui tire un peu, une petite douleur dans le pied droit.
Ayant lu la veille dans le livre de Cyrille Gindre la discontinuité entre les causes et les effets, dont je suis déjà convaincu, je sais que tout peut arriver n’importe quand et que, même si nous pensons souvent en terme de proportionnalité parce que c’est plus facile à appréhender pour nous, la réalité biologique est bien différente.
Mais comme d’habitude les raideurs passent avec l’échauffement et mon premier 1/4 heure passe à 5:35 au kilo et 133 pulsations, malgré le dénivelé. En passant à 150 puls, j’arrive vite à 4:50 au milieu des trouées de soleil dans les arbres. Je fais le tour du mémorial des aviateurs américains, toujours émouvant, et reviens sur l’itinéraire principal au moment de lâcher les chevaux dans des trouées de lumière et de verdure.
Une longue descente sur le bitume, je vais trop vite pour courir dans l’herbe. Je suis entre 14 et 15 km/h, mon allure de 10K. je passe en respiration rapide 1, 1 2 … c’est vrai que ça marche pas mal ce truc. Je termine la phase rapide par la montée où je vais me laisser aller un peu plus à la vitesse. C’est tellement différent d’aller vite … et un tel plaisir.
Je croise quelques voitures, dépasse quelques coureurs et je me sens libre et « fonctionnel » à défaut d’autre chose. J’oscille entre la concentration sur l’effort, la posture, toujours nécessaire et les divagations sur le travail, la vie, la nature …
Je termine un peu essoufflé mais heureux d’avoir passé le 1/4 d’heure rapide sans souci ni douleurs, en fantasmant sur un prochain 10K en moins de 40 minutes …
Il est temps de récupérer et … je décide d’enlever mes chaussures. Je fais la dernière section pieds nus, dans l’herbe. Herbe plus ou moins mouillée, plus ou moins froide.
Festival de sensations : j’ai froid aux pieds, il y a du soleil, il faut éviter les taupinières, les cailloux … des qu’on est pieds nus, le monde change et requiert bien plus d’attention. Mais c’est assez jouissif. Et on sent que tout le pied fonctionne. Et on retrouve des sensations d’enfance …
Evidemment quand j’arrive sur les petits cailloux du chemin, c’est moins drôle, alors j’enjambe, je saute … mais le soleil est là, je viens de courir une heure .. je croise des ouvriers dans un camion en train de tirer sur leur clope, je compatis et me réjouis (pour l’instant) de ne plus en être prisonnier.
Temps de prendre une douche et d’enfiler un costard … une séance parfaite. On ira attaquer le tartan une autre fois …